Le team principal de l’équipe Haas, Guenther Steiner, nous explique un peu plus en détail comment la crise sanitaire actuelle affecte son équipe au quotidien.
Dans un entretien accordé à la F1, le patron de Romain Grosjean et Kevin Magnussen revient en détail sur les conséquences directes de la crise sanitaire, mais surtout économique, qui touche de plein fouet les équipes de F1.
« La vie est un peu différente. Je ne voyage plus, personne ne voyage plus, pour des raisons évidentes! Mais je suis occupé à essayer de trouver des solutions, à faire survivre l’entreprise. » explique le team principal de l’équipe Haas.
« Ce n’est pas facile en ces temps parce que vous ne savez pas ce qui va arriver. » souligne l’Italien.
Haas est l’une des plus petites équipes de Formule 1, fonctionnant avec l’un des budgets le plus bas. Steiner est également confronté un défi unique de gérer le personnel dans trois pays différents – le Royaume-Uni, l’Italie et les États-Unis – chacun ayant une approche très différente de la lutte contre le coronavirus et ses conséquences.
La crainte de voir disparaître l’équipe Haas
Cette situation unique a conduit l’équipe américaine à suivre McLaren, Williams, Racing Point et Renault en plaçant plusieurs de ses employés basés au Royaume-Uni au chômage partiel.
« Ce n’est jamais plaisant d’entendre cela [le chômage partiel], mais la plupart de nos employés comprennent pourquoi nous le faisons. » explique Steiner.
« Ce n’est pas pour les licencier, c’est pour s’assurer qu’ils ont un travail à l’avenir. Il n’y a rien de malveillant, nous ne sommes pas rentables et nous essayons de ne pas perdre trop d’argent. »
« Nous essayons de faire de notre mieux. Il y a beaucoup de gens qui ont perdu leur emploi. [dans d’autres industries]. Tant que nous pouvons conserver les emplois, c’est ce que nous essayons de faire. »
« Nous avons des revenus très limités [en raison de l’absence de courses]. La FOM essaie de nous aider, mais nous ne savons pas si nous recommencerons à courir. Personnellement, je pense que nous le ferons, mais vous devez toujours prévoir le pire, comme n’avoir aucun revenu de la FOM. »
« Et si nous n’avons aucun revenu, quelqu’un doit payer – et ces fonds sont limités. Il ne serait pas juste de payer si rien ne s’est passé. »
« Il est certain qu’il y a une menace [de voir disparaître l’équipe] s’il n’y a pas de revenus, s’il n’y a pas de courses cette année, si nous ne sommes pas payés pour cela. »
« Nous devons simplement être conscients de ce que nous faisons et nous assurer que nous faisons de notre mieux et espérons que nous irons en course le plus tôt possible et que nous pourrons transformer cela en un résultat positif. »
Gene Haas va devoir prendre une décision
Gene Haas, le propriétaire de l’écurie Haas, avait prévu d’utiliser la première partie de la campagne 2020 – leur cinquième en F1 – pour décider de l’avenir de l’équipe qui porte son nom.
Steiner explique que son patron patiente depuis quelques semaines maintenant, mais qu’il ne pourra pas se permettre d’attendre trop longtemps.
« Comme nous tous, il ne sait pas ce qui va arriver dans un proche avenir, et si nous aurons ou non des courses [cette année]. »
« Il n’est pas contre le fait d’attendre longtemps, mais comme tout homme d’affaires, vous ne voulez pas attendre éternellement. Espérons qu’au cours des prochains mois, nous aurons une meilleure vision du proche avenir, j’espère que la situation ne restera pas aussi fluide qu’aujourd’hui. »
« Il n’y a personne à blâmer, c’est juste les circonstances. Pour le moment, il peut rester calme mais à un moment donné, il doit prendre une décision. »
Le monde d’après
Avec la fermeture estivale reportée au printemps et prolongée par la suite à cinq semaines, les équipes de F1 ont gelé tous les développements en cours.
Lorsque cette restriction sera levée, les plans de développement seront tout simplement impossibles à mettre en place, car il ne serait tout simplement pas possible de produire des pièces et d’introduire des développements comme les équipes l’avaient précédemment prévu avec un calendrier 2020 compressé.
Steiner souligne également que la prise de risques n’est pas une approche sensée dans cette situation car si vous rencontrez un problème, vous souffrirez plus que d’habitude en raison de la succession rapide des courses, il sera donc difficile de trouver et d’introduire une solution rapidement.
« L’approche de tout le monde va changer. Vous ne pouvez pas simplement développer et mettre à niveau la voiture. Si nous avons 15 courses en six mois, c’est un sacré boulot. Vous devez vous simplifier la vie, mais la simplifier pour ne pas faire d’erreurs. »
« Si vous rendez les choses difficiles et que vous ouvrez la possibilité de faire des erreurs, il n’y a que des inconvénients. Vous dépensez de l’argent pour le faire et essayer de découvrir ce qui a mal tourné, et vous n’avez aucun résultat, ce qui n’est pas bon. »
Haas en faveur d’un plafond budgétaire plus bas
La F1, la FIA et certaines équipes souhaitent que le plafond budgétaire soit encore réduit, tandis que certaines équipes sont contre une telle décision. En tant qu’équipe disposant du budget le plus bas, il ne sera peut-être pas surprenant d’apprendre dans quel camp se trouve Haas.
« Il faut que ça descende. Je respecte les grandes équipes et leur défi de passer d’un grand nombre de personnes à un plus petit nombre. Il y a un dicton qui dit: « Ce n’est jamais agréable de sauter dans une piscine froide, mais à un moment donné, vous devez le faire, sinon vous ne serez plus là. Il fera froid et ce sera désagréable mais quand vous l’avez fait, vous l’avez fait. »
« Cette crise nous offre une opportunité. Nous devons faire survivre le sport. Ce n’est pas bon si les trois équipes les plus riches restent campées sur leur position. Si McLaren et Renault veulent descendre [le plafond budgétaire], cela signifie quelque chose. »
« Ce sont des constructeurs automobiles. Ce sont de grandes équipes à mon avis. Ils réalisent où va le monde. Continuer comme ça n’a pas beaucoup de sens. »
« La F1 va changer, j’espère pour le mieux. J’espère toujours que nous aurons 10 équipes, qui pourront concourir pour les podiums, ce qui est peut-être un peu trop optimiste je sais, mais au moins si nous pouvons fair en sorte que la moitié de la grille puisse concourir pour le podium, ce serait bien, comme nous l’avions il n’y a pas si longtemps. »
« J’espère que nous ne reviendrons pas à celui qui a le plus gros portefeuille est le champion du monde, mais plutôt celui qui fait le meilleur effort d’équipe est champion du monde. J’espère que cette crise nous pousse dans cette direction. Mais évidemment, je ne sais pas si cela se produira. »