Romain Grosjean est une nouvelle fois revenu sur son horrible accident survenu dimanche dernier au Grand Prix de Bahreïn et dont il a réussi par on ne sait quelle force à s’en sortir vivant.
Le pilote Haas a expliqué dans un premier temps qu’il ne savait qu’il avait touché la monoplace de Daniil Kvyat, notamment parce que le Russe était dans un angle mort.
« Je ne savais pas que j’avais touché Kvyat, parce que je ne l’ai pas vu. Je me suis refait le scénario, j’ai réfléchi, j’étais énervé d’avoir coupé la piste à Kvyat. » explique le Français ce mercredi aux médias francophones à Bahreïn.
« Pourquoi je ne l’ai pas vu ? En fait, il était dans mon angle mort depuis le 1er virage jusqu’au moment de l’impact. »
« J’ai également pris en compte le fait que j’étais sorti du virage 2 beaucoup plus vite que les voitures devant moi et il y avait des débris sur le côté gauche. »
« Donc, je vais un peu à droite, et étant donné que je rattrape les voitures sur mon côté gauche et que je n’ai vu personne depuis le début sur mon côté droit, pour moi il n’y a personne et c’est pour cela que je me rabats à ce moment-là. »
« Il y avait Kvyat, le choc est subtil et je me suis même demandé si ce n’était pas moi qui avais perdu la voiture seul. Ensuite, il y a eu le choc avec la barrière, j’ai fermé les yeux, puis j’ouvre les yeux, je défais mon harnais et là je tape quelque chose qui me bloque. »
« Je me rassieds dans la voiture et j’attends que l’on vienne m’aider, et à cet instant je ne me rends pas compte que ça brûle. Et puis, je regarde à gauche et c’est tout orange. Je me dis que c’est bizarre, et puis je comprends que c’est le plastique de ma visière qui brûle. »
« Là je me dis qu’il faut que je sorte tout seul, parce qu’il n’y a pas le temps. J’essaie de sortir sans réussir et là j’ai le temps de penser que je vais finir comme Niki Lauda, mais je me dis que ce n’est pas possible, je ne veux pas finir comme ça. »
« Je réessaie, je me rassieds de nouveau et là, c’est un moment étrange parce que je vois la mort aussi proche qu’on peut la voir. Là, j’ai presque le corps qui se relâche et qui se dit que c’est terminé. »
« Je me suis demandé quelle partie allait brûler en premier et si ça allait faire mal. J’ai quand même pris 53G dans la tête, donc forcément j’étais un peu sonné. »
« Je ne sais pas si ce moment de relâchement m’a permis de reprendre des forces, de reprendre mon sang froid et de penser à mes enfants, et je me suis dit ‘ce n’est pas possible’. J’avais le pied coincé avec la pédale, j’ai dû tirer super fort pour me débloquer le pied gauche, et j’ai même essayé à droite, à gauche, en haut, je me suis dit je vais essayer de tourner mon casque, de passer la tête, tourner les épaules et de me glisser comme ça. »
« A ce moment-là, je mets les mains dans le feu, ça me brûle et j’en suis bien conscient. Je regarde mes gants qui deviennent tout noirs, je sais que je suis en train de me cramer les mains et je sens la douleur. »
« Au moment où le buste passe, c’est presque la délivrance, et je me dit que je vais vivre. Je sais que j’ai les mains brûlées, mais je sors et je passe la barrière et je sens le Dr Ian qui tire sur ma combinaison pour me faire passer de l’autre côté. »
« A ce moment-là, je sais que je suis sauvé. Il me dit très calmement « assieds toi ». J’enlève les gants, parce que je sais que j’ai les mains brûlées et je ne veux pas que ça me colle à la peau, et là je l’engueule parce qu’il me parlait comme à un blaireau. »
Ensuite, Romain Grosjean a été transporté à l’hôpital du circuit et c’est à ce moment-là que le Français a finalement le plus souffert de ses blessures.
« Au centre médical, je commence à douiller un peu, surtout au niveau du pied, étonnamment pas au niveau des mais. Je commence à trembler à cause de la douleur, et puis là il y a Jean Todt [Président de la FIA] qui est arrivé tout de suite et qui m’a dit ‘donne moi le numéro de ta femme ». C’est l’un des seuls que je connais par cœur. »
Après plusieurs tentatives, Jean Todt arrive finalement à joindre Marion Jolles Grosjean : « Là je lui ait dit « Moustique, c’est moi » et j’ai entendu Marion qui rigolait avant qu’elle ne s’effondre parce que tout le monde pensait que j’étais mort. »
« J’ai vu la mort de trop près et c’est une sensation que je ne souhaite à personne. C’est un truc de fou, et ça changera ma vie à jamais c’est certain, tu ne peux pas vivre ça et ensuite être le même homme. »
Romain Grosjean a ensuite expliqué qu’il souhaitait rouler pour la dernière course de la saison à Abou Dhabi, ne serait-ce que pour savoir : « si j’en suis encore capable, ce que je vais ressentir, comment je vais réagir. »