Le « règne de la terreur » de Mohammed Ben Sulayem à la FIA, selon son adversaire

Tim Mayer a accusé Mohammed Ben Sulayem de « défaillance dans son leadership » et de « règne de terreur » après que l’Américain a annoncé qu’il se présenterait contre le président de la Fédération internationale de l’automobile (FIA) lors des élections de cette année.

Le premier mandat controversé de Ben Sulayem à la tête de l’instance dirigeante du sport automobile mondial prendra fin en décembre. L’Émirati de 63 ans a confirmé qu’il se présenterait pour un nouveau mandat de quatre ans.

Mayer, 59 ans, a été limogé par Ben Sulayem de son poste de président des commissaires l’année dernière, mais il a insisté sur le fait que sa décision de se présenter contre Ben Sulayem n’était pas une vengeance.

« Bien sûr, cela a été décevant pour moi, car je me suis toujours engagé à servir », a déclaré Mayer, fils du cofondateur de McLaren, Teddy Mayer. « J’ai eu le privilège d’être commissaire lors de plusieurs championnats, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit.

Cela m’a donné l’occasion de réfléchir à la situation actuelle de notre fédération. J’ai toujours été engagé à servir et à aider les personnes qui travaillent pour moi, et ce que je constate aujourd’hui, c’est un échec du leadership. Il ne s’agit pas de vengeance, mais de la manière dont nous pouvons faire avancer la FIA.

Il y a trois ans, Mohammed Ben Sulayem s’était présenté avec de bonnes idées, des valeurs en faveur des petits clubs, la transparence et la réforme, et son message était juste, mais il n’a pas été mis en œuvre.

Nous avons été laissés avec l’illusion du progrès et l’illusion du leadership, tandis que l’équipe la plus expérimentée qu’il ait nommée a quitté ses fonctions. L’illusion de l’inclusion, alors que des voix compétentes, des femmes et des personnes d’horizons divers ont été écartées lorsqu’elles se sont exprimées.

Nous avons eu l’illusion de la transparence et de l’engagement. Et peut-être plus grave encore, l’illusion de l’intégrité. Nous avons assisté à une vague après l’autre de modifications statutaires qui ont conduit à la plus grande centralisation du pouvoir dans l’histoire de la FIA.

Les questions cruciales ont été décidées par des votes électroniques précipités, sans débat, où les conseils mondiaux ont été muselés et les membres du sénat écartés. Ce n’est pas de la gouvernance. »

Plusieurs personnalités de premier plan ont quitté la FIA sous la direction de Ben Sulayem. Son adjoint, Robert Reid, ancien pilote de rallye, a démissionné de son poste au début de l’année. Ben Sulaymen a également eu de multiples démêlés avec la Formule 1 et les plus grandes stars de ce sport, notamment Lewis Hamilton au sujet du port de bijoux dans le cockpit.

Mayer a poursuivi : « C’est la première fois que cela se produit à la FIA, et cela en dit long. Il n’était pas capable de faire le travail dans la position où il se trouvait. Mais il n’était qu’un parmi tant d’autres, si l’on considère le nombre de personnes qui ont démissionné de la FIA après être arrivées avec les meilleures intentions mais sans pouvoir changer les choses, ou dire : « Non, c’est une mauvaise idée, Monsieur le Président. » C’est un règne de terreur. On se demande quand la prochaine bombe va exploser ou quel sera le prochain scandale.

C’est une tâche herculéenne. Les dés sont pipés en faveur du président sortant, et c’est délibéré. Ces modifications statutaires ont été apportées pour centraliser le pouvoir. Mais je ne me lance pas dans cette course pour être élu, mais pour gagner. »

Qui pour se présenter contre Mohammed Ben Sulayem à la tête de la FIA ?

La politique va bon train dans les arcanes du sport.

À ce stade, et en dépit des nombreux départs et fortes voix s’opposant à lui, Mohammed Ben Sulayem reste le favori incontestable à sa réélection à la tête de la Fédération Internationale de l’Automobile, notamment grâce au soutien public récemment apporté par les clubs de la région MENA et des Amériques, qui ont fait savoir par le biais d’un communiqué et de manière étonnemment publique qu’ils se rangeraient d’office derrière l’actuel Président pour un second mandat. Le tout aura de quoi fortement dissuader de possibles candidatures tardives. Tout challenger devra bénéficier d’un large soutien régional, notamment en Europe, en Asie et en Océanie, et proposer une vision alternative convaincante pour la gouvernance du sport et de la mobilité, et pas seulement se montrer populaire auprès du public.

La période de nomination officielle débute généralement vers le mois d’octobre, et l’élection aura lieu en décembre 2025 lors de l’Assemblée générale annuelle de la FIA.

Alors que des noms tels que Susie Wolff et Carlos Sainz Sr. ont été avancés comme candidats potentiels à la présidence de la FIA, les probabilités de voir ces derniers se présenter sont faibles, la FIA ayant elle-même fait savoir de manière cinglante que tout confilt d’intérêt potentiel serait un élément à charge pour la prise en compte d’une candidature. Epouse de Toto Wolff, Susie Wolff est directement visée, tout comme Sainz, père du pilote Williams à qui il a donné son nom. Plusieurs challengers potentiels plus crédibles font désormais l’objet de spéculations, notamment en provenance du Royaume-Uni, où la fronde anti-Ben Sulayem est activement lancée depuis de nombreux mois.

Graham Stoker, qui a perdu les élections en 2021, reste un candidat possible bénéficiant d’un soutien modéré. Pour devenir président, Ben Sulayem a obtenu 61,62 % des voix contre 36,62 % pour Stoker, lors de la dernière élection, avec 1,76 % des membres ayant fait le choix de l’abstention.

Le président du Sénat de la FIA, Carmelo Sanz de Barros, et le vice-président chargé des sports, Robert Reid, sont également considérés comme des candidats potentiels au sein de l’organisation.

Certains rapportent que le mécontentement des ASN européennes pourrait conduire à l’entrée dans la course d’un fidèle de l’ère Jean Todt. Néanmoins, Ben Sulayem a aussi tué dans l’oeuf ce genre de risque en publiant des résultats financiers flatteurs pour la FIA après des années de lourdes pertes caractéristiques de l’ère Todt. En outre, un outsider axé sur la mobilité, issu de clubs tels que l’AAA ou l’ADAC, demeurerait un outsider lointain mais possible.

Pour l’heure, aucun challenger officiel ne s’est encore déclaré avant les prochaines élections…

Le président de la FIA dans la tourmente

Le président de la FIA, Mohammed Ben Sulayem, se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente après que des remarques misogynes lui ont été attribuées dans un article publié ce vendredi dans la presse britannique. 

Ce vendredi 27 janvier, le Times a publié sur son site internet un article dans lequel le quotidien britannique a rendu public une partie du contenu d’un ancien site web appartenant à Mohammed Ben Sulayem et sur lequel l’actuel président de la FIA aurait tenu des propos phallocrates. Dans son article, le Times cite un Ben Sulayem disant qu’il « n’aime pas les femmes qui pensent qu’elles sont plus intelligentes que les hommes, car elles ne sont pas dans la vérité. »

Après cette énième controverse depuis le début de l’année en lien avec le président de la FIA, l’instance dirigeante a rapidement réagi via son porte-parole qui a déclaré : « Les remarques sur ce site web de 2001 désormais archivé ne reflètent pas les convictions du président. »

« Il [Ben Sulayem] a un solide bilan en matière de promotion des femmes et de l’égalité dans le sport, sur lequel il est heureux d’être jugé. C’était un élément central de son manifeste et les actions entreprises cette année et au cours des nombreuses années où il a été vice-président pour le sport le prouvent. »

Les questions visant à savoir si ce site web appartenait bien à Mohammed Ben Sulayem et s’il reflétait fidèlement ses opinions à l’époque n’ont reçu aucune réponse mais cet incident est le dernier en date d’une série de controverses qui concerne le président de la FIA depuis le début de son mandat fin 2021.

Au début du mois de janvier, Mohammed Ben Sulayem a provoqué une certaine division dans le paddock de la F1 en décidant que les pilotes seraient désormais passibles de sanctions s’ils enfreignaient les règles sur les déclarations politiques durant un week-end de Grand Prix. Quelques jours plus tard, le président de la FIA s’est dit surpris de la réaction négative de certains suite à l’annonce du rapprochement Andretti-Cadillac en vue d’une potentielle arrivée en F1 et a estimé que l’arrivée d’une nouvelle équipe en Formule 1 devrait être encouragée plutôt que repoussée.

Plus récemment, Ben Sulayem a déclenché la colère des hauts responsables de la F1 pour avoir soulevé publiquement [sur Twitter] ses inquiétudes quant aux conséquences potentielles d’une prise de contrôle « gonflée » à la suite d’informations faisant état d’une offre saoudienne de 20 milliards de dollars (16,3 milliards de livres sterling) pour acheter les droits du sport à Liberty Media.

Dans la foulée de ces déclarations, les responsables de la Formule 1 ont envoyé une lettre à la FIA dans laquelle ils ont condamné « des propos inacceptables » du président de la FIA. La lettre indique également qu’en vertu de son contrat, la F1 « a le droit exclusif d’exploiter les droits commerciaux du Championnat du Monde de F1 de la FIA » et que « la FIA s’est engagée sans équivoque à ne rien faire qui puisse porter atteinte à la propriété, à la gestion et/ou à l’exploitation de ces droits. »

La FIA soutient les femmes dans le sport

Les propos sexistes attribués à Mohammes Ben Sulayem ne doivent pas éclipser le fait que l’instance dirigeante soutient activement les femmes dans le sport depuis de nombreuses années. En août 2022, la FIA a publié un communiqué en réaction aux propos tenus cette fois par le PDG de la F1, Stefano Domenicali, qui avait indiqué que la discipline reine du sport automobile ne verrait probablement aucune femme dans la catégorie dans les années à venir : « Je ne vois pas – à moins qu’il y ait quelque chose qui ressemblerait à une sorte de météorite qui arrive sur Terre – une fille qui entre en Formule 1 dans les cinq prochaines années. » a déclaré l’Italien.

« C’est très peu probable, je dois être réaliste. Mais nous voulons construire la bonne pyramide avec la bonne approche, étape par étape, afin qu’elle commencent à courir contre les gars au bon âge, avec la bonne voiture. C’est vraiment ce sur quoi nous travaillons. »

Les réactions n’ont pas tardé à fuser et le président de la FIA Mohammed Ben Sulayem a confirmé que la FIA s’était engagée à offrir des opportunités aux coureuses à travers divers programmes : « Depuis sa création, la FIA a toujours soutenu et encouragé les femmes dans le sport automobile. Le sport automobile est unique car, selon le règlement de la FIA, les femmes et les hommes peuvent concourir sur un pied d’égalité. »

« Nous continuerons à encourager activement la participation des femmes, que ce soit par le biais de notre programme FIA Girls On Track Rising Stars, la présence de femmes dans nos équipes de direction de course, opérations et techniques et dans d’autres départements de l’organisation ou en partenariat avec nos ASNs avec des femmes qu’elle soient bénévoles ou officiels. »

« La FIA et la FOM s’engagent à offrir davantage d’opportunités aux femmes dans le sport. Stefano Domenicali et moi travaillons ensemble pour améliorer l’accès et la pyramide pour l’entrée et la progression des femmes. Tout au long de l’histoire, les femmes ont fait leur marque dans le sport automobile, sur et hors piste, et nous souhaitons, sous ma direction, que la tendance se poursuive dans les années à venir. »